MONOGRENADE – "Tantale"

MONOGRENADE – "Tantale"

copyright Christophe Collette

Ils sont quatre et s’appellent Monogrenade pour une histoire de fruits et parce que ça sonnait bien. Et le mieux est de les écouter. Car on aura beau chercher, ce nom ne veut rien dire pour nous : leur musique est bien enregistrée en stéréo et leur premier album « Tantale » éclate plus d’une fois à la figure. C’est même une succession d’explosions, un feu d’artifice dont le bouquet final survient au détour de chacun des douze morceaux. Monogrenade nous vient de Montréal, Québec, Canada, Amérique.

Un Océan nous sépare et pourtant, le groupe chante dans un Français conjugué au plus-que-parfait, une nouvelle langue immédiatement saisissante et glaçante, lyrique et onirique comme on l’a rarement vécue de ce côté-ci de l’Atlantique. Monogrenade, c’est pop, c’est rock, c’est folk, avec une touche d’électronique et des tonnerres de cordes. Monogrenade, ce sont des mots en français et une musique comme seule peut en accoucher la montagne, avec ce souffle épique qui naît des grands espaces.

C’est en 2008 que Jean-Michel Pigeon, chanteur, auteur compositeur, se décide à partager ses chansons avec la planète qui l’a vu naître. Rejoint par Marianne Houle, Mathieu Collette et François Lessard, Monogrenade publie en juin 2009 le EP huit titres La saveur des fruits. L’accueil est excellent, les concerts s’enchaînent et Monogrenade séduit immédiatement par ses prestations intenses et enflammées comme aux Francofolies de Montréal et au festival M pour Montréal, puis sur quelques scènes françaises, et en première partie de Moriarty.

Les quatre partent s’isoler dans un village des Laurentides à une heure de Montréal, au beau milieu de la forêt. Durant deux semaines, ils enregistrent jour et nuit dans un chalet les douze chansons de Tantale. L’humeur boisée, la nature sauvage et la présence animale provoquent cette rencontre entre chaleur organique et approche contemporaine. Un violoncelle déchaîné croise des guitares acoustiques, un banjo danse sur un synthé et les machines se plient aux désirs de l’humain pour des effets discrets et délicats. Tantale, c’est du rock lyrique et enjoué, végétal et digital.

  Les textes de Jean-Michel vous tombent dessus comme d’étonnantes chutes d’eaux. L’amour, la vie… ses états d’âme frappent par les métaphores animales et les circonvolutions terriennes qu’il fait subir aux mots de sa voix fluette et aérienne, humble et réservée comme chez Yves Simon ou William Sheller. Sa langue personnelle et envoûtante s’inscrit dans une nouvelle école québécoise autant galvanisée par le lyrisme d’Arcade Fire que par les magnifiques paysages désolés de la scène post-rock. Le rouge intense du cœur s’y marie au gris de l’horizon dans un langage que Jean-Michel est le seul à parler mais qui éveille tous nos sens.

Tantale, ce sont douze voyages dont on revient éberlués, avec l’impression que la chanson en français et le rock ont été réinventés dans un chalet québécois, électrifiés par les éclairs d’un orage et brûlés dans l’âtre d’une cheminée. Monogrenade, c’est une poésie à fleur de peau, un sublime conte de fées dont on percera peut-être un jour les nombreux secrets. Pour l’instant, Tantale c’est un supplice auquel on ne peut résister et Monogrenade une histoire de fruits qu’on voudrait ne jamais voir s’arrêter. On leur fait confiance. Le mieux c’est encore et toujours de les écouter.

Compétences

Posté le

9 avril 2012